Dans une société où l’espérance de vie s’allonge et les enjeux de l’autonomie deviennent cruciaux, la protection des personnes âgées émerge comme un pilier essentiel pour préserver la dignité, les droits et les choix de vie des aînés. Face à la variété des dispositifs d’assistance et de représentation existants, ce guide propose un éclairage des différentes options, de la tutelle à la curatelle, en passant par le mandat de protection future ou la personne de confiance. Objectif : offrir une boussole claire et pratique dans le choix d’une protection pertinente pour une personne âgée.

Depuis la loi 2002-2 rénovant l’action sociale et médico-sociale, l’esprit de la loi a changé. Auparavant orientés vers la protection des intérêts de la personne à protéger, désormais les textes favorisent le respect de l’autonomie et la recherche du consentement.

Deux grands types de dispositifs se distinguent dans ce nouveau cadre : les mesures de protection juridique et les régimes de droit commun de la représentation. Les mesures de protection juridique, telles que la tutelle, la curatelle, la sauvegarde de justice et l’habilitation familiale, se concentrent sur la mise en place d’un cadre légal pour assister ou représenter les personnes dans l’exercice de leurs droits. Les régimes de droit commun de la représentation comprennent notamment le mandat de protection future, la procuration et la désignation d’une personne de confiance.

Code civil

Article 425 : « Toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté peut bénéficier d’une mesure de protection juridique […]. 

S’il n’en est disposé autrement, la mesure est destinée à la protection tant de la personne que des intérêts patrimoniaux de celle-ci. Elle peut toutefois être limitée expressément à l’une de ces deux missions. »

Article 428 : « La mesure est proportionnée et individualisée en fonction du degré d’altération des facultés personnelles de l’intéressé. »

Les mesures de protection juridique

Tutelle

La tutelle est le dispositif le plus complet en matière de protection juridique. Elle s’adresse aux personnes qui voient leurs facultés si altérées, qu’elles ne peuvent plus accomplir elles-mêmes les actes de la vie civile et ont donc besoin d’être représentées de manière continue par quelqu’un d’autre. La demande de mise sous tutelle peut être initiée par la personne âgée, par ses proches, ou par le procureur de la République. Un juge décide ensuite de la mesure à prendre, sur avis d’un médecin expert. La durée maximale d’une tutelle est de 5 années, renouvelable aussi souvent que nécessaire.

Le saviez-vous ?

Le tuteur agit au nom de la personne protégée pour gérer ses biens, représenter ses intérêts et prendre les décisions médicales ou administratives nécessaires. Il doit rendre compte de sa gestion à un greffier en chef du tribunal.

Curatelle

La curatelle est une mesure de protection judiciaire destinée aux adultes dont les capacités à gérer leurs affaires sont altérées, mais pas suffisamment pour justifier une tutelle. Le curateur assiste la personne dans les actes importants de la vie civile, tels que la gestion financière ou la signature de contrats, tout en laissant la place à une certaine autonomie pour les décisions du quotidien.

La demande de mise sous curatelle peut être initiée par la personne à protéger, un membre de sa famille ou le procureur de la République. Un juge des contentieux de la protection, après évaluation de l’état de la personne par un médecin expert, décide de l’instauration de la mesure, qui peut être simple ou renforcée, selon le degré d’assistance requis.

  • Curatelle simple : La personne conserve le droit de réaliser des actes de gestion courante, tandis que les actes importants nécessitent l’assistance du curateur, tels que la vente ou l’achat de biens immobiliers, l’ouverture ou la clôture d’un compte bancaire, la signature de certains contrats, etc.
  • Curatelle renforcée : Le curateur prend en charge la gestion des revenus de la personne protégée, qui garde la main sur les dépenses de la vie quotidienne.
  • Curatelle aménagée : Le juge détermine la liste des actes que la personne peut accomplir seule ou avec l’assistance de son curateur. Cette curatelle est ainsi ajustée de manière optimale aux besoins spécifiques de la personne à protéger.

La durée maximale d’une curatelle est de 5 ans, renouvelable autant de fois que la mesure est nécessaire.

Sauvegarde de justice

La sauvegarde de justice est une mesure temporaire, d’un an maximum, renouvelable une seule fois. Elle peut être utilisée en cas d’urgence, en attendant la mise en place d’une curatelle ou d’une tutelle par exemple, ou quand l’état de la personne à protéger peut s’améliorer. Dans le cas d’une sauvegarde de justice, la personne âgée conserve le droit d’accomplir tous les actes de la vie civile, mais les actes qu’elle réalise peuvent être annulés ou modifiés s’ils sont jugés non conformes à ses intérêts.

La mise sous sauvegarde de justice peut notamment être demandée par un membre de la famille ou la personne concernée elle-même. Elle doit être déposée auprès du juge des contentieux de la protection du tribunal d’instance dont dépend le lieu de résidence de la personne à protéger.

Habilitation familiale

L’habilitation familiale est un dispositif mis en place pour simplifier les démarches à accomplir par les proches d’une personne se trouvant dans l’incapacité de manifester sa volonté, afin de la représenter ou passer des actes en son nom. En effet, l’habilitation familiale permet d’éviter le formalisme habituel des mesures de protection judiciaire, telles que la tutelle ou la curatelle. Contrairement à ces dernières, le juge n’intervient plus une fois que l’habilitation est décidée.

L’habilitation familiale est particulièrement adaptée quand il existe un consensus familial. Après une demande au juge des contentieux de la protection, celui-ci peut accorder une habilitation générale ou spécifique à certaines décisions. Un ou plusieurs proches sont alors habilités à agir au nom de la personne âgée. À noter que le Procureur de la République peut aussi adresser une demande d’habilitation familiale.

La protection juridique, en Bref

La tutelle permet une représentation complète dans les actes de la vie civile et la gestion des biens. Elle est destinée à protéger des personnes dont l’autonomie est extrêmement limitée, voire inexistante.

La curatelle offre un niveau de protection inférieur à la tutelle, avec une supervision judiciaire des actes importants uniquement. Avec l’existence de la curatelle simple ou renforcée, ce dispositif peut s’adapter au degré d’autonomie de la personne âgée.

La sauvegarde de justice est adaptée pour une protection temporaire, souvent en attente d’une évaluation plus approfondie ou en cas de récupération potentielle des facultés de la personne. Elle permet de maintenir un certain degré d’autonomie pour la personne protégée.

L’habilitation familiale permet à un ou plusieurs membres de la famille d’être désignés pour prendre des décisions au nom de la personne âgée. L’habilitation familiale peut être générale ou spécifique à certaines décisions. Sa mise en place est généralement plus rapide et moins complexe que celle de la curatelle, ce qui peut être avantageux en cas de besoin urgent d’une protection légale. En confiant la protection de la personne âgée à ses proches, ce dispositif favorise une approche plus personnelle et affective.

Les régimes de droit commun de la représentation

Mandat de protection future

Le mandat de protection future permet à toute personne majeure, ne faisant pas l’objet d’une mesure de tutelle ou d’une habilitation familiale, d’anticiper une perte d’autonomie en désignant à l’avance la ou les personnes qui seront chargées de la représenter et de gérer ses intérêts le moment venu.

Le mandat doit être établi par écrit, de préférence avec l’aide d’un notaire pour assurer sa solidité juridique. Il prend effet automatiquement dès que les conditions définies sont réunies, sans nécessiter d’intervention judiciaire.

La procuration

La procuration est un document légal par lequel une personne (le mandant) donne à une autre personne (le mandataire) le pouvoir d’agir en son nom pour réaliser des actes juridiques, tels que la gestion de comptes bancaires, payer des factures ou vendre des biens. La procuration doit déterminer l’étendue des pouvoirs accordés au mandataire, car ils peuvent être spécifiques ou généraux, englobant par exemple la gestion de tous les biens du mandant.

La procuration est relativement facile à mettre en place. Il s’agit d’un document écrit, précisant l’identité du mandant et du mandataire, ainsi que l’étendue des pouvoirs conférés. Il doit être signé par le mandant, et parfois par le mandataire, selon les exigences légales ou bancaires. À noter que pour certaines opérations, en particulier celles concernant l’immobilier, une formalisation par acte notarié peut être requise. Enfin, le mandant peut révoquer la procuration à tout moment.

Points de vigilance

La procuration nécessite une confiance absolue dans le mandataire, car elle lui donne le pouvoir d’agir au nom du mandant.

La procuration ne remplace pas une tutelle ou une curatelle, si le mandant potentiel est dans l’incapacité de gérer ses affaires ou de comprendre les implications de ses actes.

La personne de confiance

La personne de confiance est consultée lorsque la personne âgée rencontre des difficultés dans la connaissance et la compréhension de ses droits. La personne de confiance peut l’accompagner dans ses démarches et assister aux entretiens médicaux. Le rôle de la personne de confiance se limite aux décisions médicales et au parcours de soins, sans empiéter sur les autres aspects juridiques ou financiers de la vie de la personne à accompagner. L’objectif est de soutenir moralement le sénior, de l’aider dans sa prise de décision, mais aussi de s’assurer que sa volonté est bien prise en compte, même lorsque celui-ci se trouve dans l’incapacité de l’exprimer.

Bon à savoir

Les dispositions relatives aux malades en fin de vie en France ont renforcé le rôle et l’importance de la personne de confiance. En particulier, la loi Claeys-Leonetti de février 2016, stipule que lorsque le patient est hors d’état d’exprimer sa volonté et n’a pas laissé de directives anticipées, ou si ces directives ne sont pas disponibles ou applicables à la situation en cours, le témoignage de la personne de confiance prévaut sur tout autre témoignage. Cela signifie que dans le cadre des décisions médicales, notamment celles relatives à la poursuite, la limitation, l’arrêt de traitement ou à l’administration de soins palliatifs, l’avis donné par la personne de confiance doit être pris en compte en premier lieu par l’équipe soignante.

Comment faire une demande de mise sous tutelle, curatelle ou sauvegarde de justice ?

Pour demander la mise en place d’une mesure de protection juridique, plusieurs documents et informations doivent être fournis au juge des contentieux de la protection. Voici les éléments à inclure dans la demande :

  • Certificat médical circonstancié
  • Copie (recto-verso) de la pièce d’identité de la personne à protéger
  • Description des faits
  • Formulaire de demande (Cerfa n°15891*3) : https://www.service-public.fr/simulateur/calcul/15891
  • Nom du médecin traitant
  • Copie intégrale de l’acte de naissance datant de moins de 3 mois.
  • Indiquer les noms et les relations des personnes proches (époux, épouse, partenaire de Pacs, concubin, etc.).
  • Copie (recto-verso) de la pièce d’identité de la personne à l’origine de la demande

La personne à l’origine de la demande, doit dans la mesure du possible, donner des informations détaillées concernant la situation familiale, financière et patrimoniale du majeur à protéger. Ces éléments aideront le juge à évaluer la situation et à décider de la mesure de protection la plus adaptée.

Une fois la demande déposée, le juge auditionnera la personne concernée, qui peut si besoin être assistée par un avocat. Cette audition peut se dérouler au tribunal, à domicile ou dans tout autre lieu approprié, et vise à informer la personne de la procédure, recueillir son avis, et évaluer son état de santé. Le juge peut également entendre d’autres personnes proches et mener des enquêtes pour instruire le dossier.

Enfin, le juge prend une décision proportionnée et motivée, en tenant compte des éléments recueillis, et peut, si nécessaire, placer temporairement le majeur sous sauvegarde de justice en attendant le jugement final.

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