21 septembre 2021

Au sein de l’Ehpad, les personnes atteintes de troubles cognitifs sévères, comme la maladie d’Alzheimer, requièrent une attention particulière. Pour répondre à leurs besoins, l’accompagnement de ces résidents s’organise dans des unités de vie protégées. À l’occasion de la journée mondiale de sensibilisation à la maladie d’Alzheimer, Natacha Millot, Directrice de la Résidence Pré du lac Emera à Châteauneuf-Grasse (06) revient sur les unités de vie spécialisées de son établissement.

En quoi consistent précisément les unités protégées au sein de l’Ehpad ?

Natacha Millot : Les unités protégées ont pour principal objectif d’accueillir des résidents qui ont besoin d’un environnement adapté aux troubles du comportement et aux troubles cognitifs, comme la maladie d’Alzheimer. L’architecture sécurisée et l’accompagnement personnalisé des unités protégées répondent à ce besoin. Elles disposent par ailleurs d’espaces communs, offrant par exemple une déambulation en toute sécurité et une sortie possible avec l’accompagnement d’un professionnel de santé.

Quels critères permettent de déterminer la nécessité d’une prise en charge en unité protégée au sein de l’Ehpad ?

Natacha Millot : Le choix d’un placement en unité protégée requiert une préconisation de l’équipe pluridisciplinaire et du médecin traitant. On y associe la famille, et particulièrement son représentant légal. Au-delà des simples critères d’entrée, l’équipe pluridisciplinaire détermine notre capacité à répondre aux besoins spécifiques du résident, qui ne peuvent plus être remplis dans un secteur classique. Ces besoins sont multiples : celui de pouvoir se mouvoir en toute sécurité dans un espace ne présentant pas de risques majeurs et sans contrainte, mais également dans un espace avec des repères ; une liberté dans les actes de la vie quotidienne (repas en décalé, toilette tardive…), soit une adaptation du soignant aux habitudes de vie fluctuantes du résident ; un besoin de contact social plus accru qu’en secteur ouvert (lutte contre le sentiment d’isolement social et prévention de l’anxiété), ou à contrario le besoin d’un environnement moins stimulant (son, bruit, nombre de résidents limité…).

Tous les besoins identifiés s’inscrivent dans une dynamique de maintien de l’autonomie, de stabilisation voire d’amélioration des troubles existants. Un projet personnalisé est élaboré sur la base de ces besoins sociaux, médicaux, cognitifs et psycho-émotionnels, et intégré dans le projet de soins.

Comment sont organisées les unités protégées de votre établissement ?

Natacha Millot : Dans la résidence, nous avons une capacité de 96 lits au total, dont trois unités de douze lits chacune. Les chambres sont aménagées avec des objets familiers, voire avec les meubles des résidents.

Nous avons un soignant dédié à chaque unité et deux soignants qui interviennent tout au long de la journée en appui, spécifiquement formés à l’animation auprès des personnes présentant des troubles cognitifs. Ce sont les « assistants de soins en gérontologie » ou ASG. On compte aussi la présence d’agents de service hôtelier dédiés. Enfin, l’ensemble des professionnels de la structure, internes (responsable de vie sociale, psychologue, psychomotricienne, médecin coordonnateur) ou externes (kinésithérapeute, orthophoniste, podologue…), peuvent également intervenir.

La vie sociale au sein des unités protégées est adaptée au profil des résidents, à leurs capacités de concentration et à leurs goûts. Les interventions proposées en secteur ouvert le sont aussi dans les unités protégées.

Quel est le rôle des professionnels accompagnants au sein des unités protégées ?

N.M. : Le rôle des professionnels au sein des unités protégées est avant tout de créer un environnement dans lequel le résident est en confiance. Tous les professionnels qui interviennent, en particulier le soignant dédié, ont pour objectif de veiller au bien-être du résident. Son rôle est essentiel dans l’ajustement du projet de soins mais également du projet de vie du résident. Il observe, analyse et transmet les informations à l’équipe pluridisciplinaire. Il est aussi l’interlocuteur privilégié de la famille.

Sa connaissance approfondie des résidents lui permet d’animer des activités au sein de son unité en s’adaptant à chaque profil. La proximité induite par l’aide apportée dans tous les gestes de la vie quotidienne crée une interaction singulière entre le résident et le soignant. Le climat de confiance va permettre une communication (verbale ou non verbale) et un accompagnement plus fluide.

En Ehpad, comment s’expriment au quotidien les symptômes des troubles cognitifs d’une maladie comme Alzheimer ?

N.M. : Souvent, cela commence par des oublis anodins du quotidien, comme le fait de ne plus retrouver sa chambre, oublier la date du jour, mais aussi par des altérations du raisonnement ou des perceptions erronées de la réalité.

L’étendue des symptômes croît au fil de l’évolution de la maladie. Cela peut aller jusqu’à ne plus reconnaitre ses proches, présenter des troubles sévères du langage, ou encore, présenter une incapacité à réaliser un mouvement ou un acte.

D’une manière générale, on reconnaît un ralentissement de la pensée chez la personne âgée qui peut présenter un signe pathologique, ce qui caractérisera une démence. La démence engendre une symptomatologie comportementale qui s’exprime par de l’anxiété, de l’agressivité, de l’apathie, des idées délirantes, des troubles ou une inversion du sommeil, une inversion du rythme…

Comment favorisez-vous l’autonomie des personnes âgées atteintes de troubles cognitifs ?

N.M. : L’autonomie est la capacité à réaliser seul un acte de la vie quotidienne. Au quotidien, l’équipe pluridisciplinaire participe donc au maintien de l’autonomie par une stimulation acceptée par le résident et dans toutes les sphères de sa vie (sociale, moteur, physique, cognitive et émotionnelle).

Nous avons recours à la méthode Montessori : nous les aidons à faire, et ne faisons pas à leur place ; nous mettons en avant les acquis restants, sans pointer les incapacités du résident ; et enfin, nous utilisons des aides externes (pictogrammes, autobiographie, procédure d’action…). Par exemple, l’une de nos résidentes, qui a été pianiste, a des difficultés à se souvenir de son prénom et du numéro de sa chambre. Nous avons donc affiché une image de piano sur la porte de sa chambre, ce qui lui permet désormais de la retrouver plus facilement.

Nous mettons aussi en place des activités (activités manuelles, chant, cuisine) et des ateliers (ateliers mémoires, éveil corporel, zoothérapie, bien-être…).

Quelle est la place de la famille et des aidants d’une personne âgée en UP ?

N.M. : Au quotidien, la famille a un rôle indispensable puisqu’elle couvre la sphère affective. Elle évite la rupture du lien social. C’est avec les siens que la personne désorientée peut retrouver les racines de son histoire.

Les visites des familles sont aussi libres en unité protégée qu’en secteur ouvert. Le rôle des aidants est identique, voire encore plus important. Souvent, quand un senior entre en unité de vie spécialisée pour Alzheimer ou pour d’autres troubles cognitifs, il n’est pas en mesure de nous partager ses habitudes de vie, alors qu’elles nous sont indispensables. Les proches de la personne âgée peuvent notamment nous donner des indications sur ses goûts, ses habitudes… Nous avons mis en place un outil, un document « Faisons connaissance ! », qui nous permet de mieux connaître le résident, son métier, ses allergies, ses anciennes activités ou encore ses goûts alimentaires. Grâce à tous ces échanges, on va adapter les repas, les activités… L’idée est de s’adapter le plus possible au rythme des résidents tout en prenant en compte les règles de la vie en collectivité. La famille est donc partie prenante. En amont, il est important qu’elle comprenne la réalité de l’état de santé de leur proche et le sens du travail réalisé par l’équipe.

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